Dans le domaine de la thérapie corporelle, et particulièrement en thérapie par le massage, les professionnels peuvent être confrontés à des clients pour qui le corps est une source de préoccupations et de souffrance. La dysmorphophobie, ou trouble dysmorphique corporel (TDC), est un trouble complexe de l’image corporelle, qui influence la perception de soi et les relations sociales. Comprendre ce trouble est essentiel pour mieux accompagner les personnes concernées dans un cadre bienveillant.
Sommaire Symptomatologie : Les signes de la dysmorphophobie Diagnostic de la dysmorphophobie Conséquences psychosociales Traitements recommandés L’importance d’une prise en charge bienveillante |
Symptomatologie : Les signes de la dysmorphophobie
Les personnes atteintes de dysmorphophobie développent une obsession pour des défauts physiques perçus, généralement peu visibles, voire inexistants pour les autres. Ces préoccupations touchent souvent le visage (acné, rides, pilosité, etc.) mais peuvent concerner toute autre partie du corps (poitrine, jambes, nez…). Chez les hommes, on observe parfois une forme spécifique appelée dysmorphie musculaire, caractérisée par une obsession de la masse musculaire perçue comme insuffisante.
Les comportements associés incluent des vérifications répétitives devant le miroir, des rituels de toilettage excessifs, des comparaisons fréquentes avec d’autres personnes, ou encore des tentatives de camouflage des défauts imaginés. Ces comportements compulsifs peuvent occuper plusieurs heures par jour, perturbant significativement la vie quotidienne et les interactions sociales.
Diagnostic de la dysmorphophobie
Le diagnostic de la dysmorphophobie repose sur un ensemble de critères, parmi lesquels :
- Une préoccupation intense pour des défauts d’apparence corporelle peu visibles ou imaginés.
- La répétition de comportements de vérification ou de camouflage.
- Une détresse marquée qui interfère avec le fonctionnement social ou professionnel.
Il est important de différencier ce trouble d’autres conditions similaires. Par exemple, si la préoccupation concerne uniquement la forme corporelle en lien avec l’alimentation, un trouble alimentaire pourrait être diagnostiqué à la place. La dysmorphophobie, en revanche, se caractérise par une focalisation sur des détails corporels spécifiques, souvent dans une logique irrationnelle.
Conséquences psychosociales
La dysmorphophobie peut avoir des répercussions majeures sur la vie des individus. Les activités sociales et professionnelles sont souvent perturbées par les préoccupations incessantes sur l’apparence. Certaines personnes évitent totalement les interactions sociales, et il n’est pas rare qu’elles préfèrent sortir uniquement la nuit ou qu’elles se retirent complètement de la vie sociale. L’isolement peut aller de paire avec une dépression sévère, augmentant le risque de pensées suicidaires. Des études montrent que jusqu’à 80 % des personnes atteintes de dysmorphophobie développent des idées suicidaires, et près de 30 % les mettent en action.
Traitements recommandés
Pour de nombreuses personnes atteintes de dysmorphophobie (BDD), la chirurgie esthétique ne parvient pas à atténuer leurs symptômes, car leur perception de leur apparence n’est pas ancrée dans la réalité. Il est recommandé que les chirurgiens esthétiques et les psychiatres travaillent ensemble pour examiner les patients avant une opération afin de détecter un éventuel BDD, car les résultats de la chirurgie pourraient être nocifs pour eux (Bowyer et al., 2016).
Le traitement de la dysmorphophobie combine souvent une approche pharmacologique et une thérapie cognitivo-comportementale (TCC). Les antidépresseurs tels que les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) sont souvent prescrits pour réduire les symptômes obsessionnels, tandis que la TCC aide les patients à travailler sur les pensées irrationnelles et à diminuer les comportements répétitifs.
La TCC comprend des techniques d’exposition graduelle et de prévention des rituels (comme limiter le temps passé devant le miroir) ainsi que des exercices de reconstruction cognitive. Pour les cas les plus sévères, un traitement combinant médicaments et thérapie s’avère souvent plus efficace.
L’importance d’une prise en charge bienveillante
Dans le contexte de la thérapie par le massage, il est essentiel que le thérapeute soit conscient des implications de la dysmorphophobie. Les praticiens peuvent jouer un rôle clé en fournissant un espace de confiance et en évitant les remarques sur l’apparence physique des clients. S’ils soupçonnent une dysmorphophobie, encourager le client à consulter un professionnel de santé mentale peut être bénéfique. Le massage peut apporter une détente et une meilleure connexion au corps, mais la prise en charge complète nécessite une approche multidisciplinaire.
En étant informé sur les troubles de l’image corporelle comme la dysmorphophobie, le thérapeute en massage contribue à offrir un accompagnement respectueux et adapté, aidant ainsi ses clients à retrouver une relation apaisée avec leur corps.
A retenir :
- Les personnes atteintes de dysmorphophobie développent une obsession pour des défauts corporels imaginés ou peu visibles, entraînant des comportements répétitifs (comme vérifier leur apparence) qui perturbent leur quotidien.
- La dysmorphophobie se distingue par une focalisation irrationnelle sur certains détails physiques, et doit être différenciée des troubles alimentaires ou de la dysphorie de genre.
- Elle peut entraîner un isolement social, une dépression, et un risque accru de pensées suicidaires, nécessitant une prise en charge sérieuse.
- La combinaison de la thérapie cognitivo-comportementale et des antidépresseurs est souvent efficace, et le massage peut offrir un cadre de détente et de bienveillance, bien qu’un accompagnement spécialisé soit souvent nécessaire pour une prise en charge complète.
Sources :
- American Psychiatric Association (2022). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders : DSM-5-TR.
- Le Manuel MSD. Dysmorphophobie. Site internet : msdmanuals.com ; 2023
- Bowyer, Laura; Krebs, Georgina; Mataix-Cols, David; Veale, David; Monzani, Benedetta (December 2016). “A critical review of cosmetic treatment outcomes in body dysmorphic disorder”. Body Image. 19: 1–8. doi:10.1016/j.bodyim.2016.07.001. PMID 27517118. S2CID 4553598.